Se rendre invisible face au Big Data






12 Avril 2016

Au-delà de l’anecdote, l’exposition qui se déroule à la Gaîté Lyrique, « Extra fantômes. Les vrais, les faux, l'incertain », propose des directions afin de contrer la surveillance engendrée par le big data.


Je suis invisible, donc je suis. Dans un monde ultra connecté où les données personnelles échappent de plus en plus à leurs possesseurs, le pouvoir finalement, c’est l’invisibilité. Une invisibilité qui se travaille. Notamment, en apprenant à avoir moins de champ électro-magnétique ; à « échapper aux ondes, au big data, aux caméras et à effacer son ADN », selon Rue89 et Le Nouvel Observateur. C’est une des directions proposées par l’exposition Extra Fantômes qui vient d’ouvrir ses portes à la Gaîté Lyrique à Paris. En gros, comme le dit Le nouvel Obs : « Big data, surveillance : reprenez le pouvoir et devenez invisible. »

Tout un programme. Et un programme passionnant que dessinent les unes après les autres, les œuvres de l’exposition. De l’abstraction, on va passer à quelque chose de plus concret : il est question ici d’échapper aux ondes, peu importe la méthode et la manière. En effet, selon Finn Brunton, professeur à la New York University, et co-auteur d’un livre sur l’obfuscation (Obfuscation, A User’s Guide for Privacy and Protest) ainsi qu’une histoire des spams, (Une histoire de l'ombre de l'Internet), « les données que nous générons sans le savoir créent autour de nous des doubles fantomatiques (…) des doppelgängers, nos doubles maléfiques, (qui) vivent dans l’ombre des réseaux. »

Une fois le ton donné, la question est la suivante : pour « échapper à ces fantômes, faut-il renoncer à la technologie ? » Non, répond Vinciane Despret, avant d’ajouter : « il est évidemment essentiel d’échapper à la prise de pouvoir qu’ont ces technologies sur nos vies mais j’aime tellement mieux cette réponse : continuons à les utiliser et faisons-le de telle sorte à retourner les possibilités du système contre lui-même. En étant par exemple invisibles ! » L’invisibilité donc, est toujours le grand sujet.

L’exposition propose des projets qui vont dans ce sens. De quoi se protéger des ondes grâce à des objets innovants : des « vêtements et accessoires anti-surveillance » ; des tenues qui rendent « les porteurs indétectables aux techniques d’imagerie thermiques » ; un kit pour effacer ou remplacer son ADN ; des installations à base de LED qui, « combinées à la technique du light-painting (longue exposition), rendent visible le wifi » ; ou encore, la machine qui détruit les archives. Histoire de ne « pas laisser de traces. »

Pour le moment, ces objets ou projets restent aléatoires, et « n’ont pas vraiment vocation à être réellement utilisés. Ils relèvent plutôt du design critique, cette branche du design qui cherche à provoquer la réflexion en produisant des objets provocateurs. » Malgré tout, brouiller les pistes, ne pas laisser de traces, est un souhait de plus en plus prégnant. Tout porte à se rendre invisible. La tendance de demain ? Faut croire.
 
Exposition Extra fantômes. Les vrais, les faux, l'incertain, à la Gaîté lyrique, Paris 3 ème, du 7 avril au 31 juillet 2016.