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Les voitures de collection, placements en or en temps de crise ?







8 Avril 2013

Le salon Rétromobile de février 2013 a connu un nouveau record d’affluence cette année, en plus d’un nouveau record de ventes : sur les 115 véhicules exposés, 105 ont été vendus pour un total de près de 15 millions d’euros (1). Les voitures de collection attirent de plus en plus d’investisseurs à la recherche de placement alliant plaisir et rentabilité.


Aston Martin DB5 de 1964
Aston Martin DB5 de 1964
A l’exception de quelques grandes fortunes à la recherche d’une diversification de leur portefeuille de placements, peu de gens achètent une voiture de collection comme on souscrit un plan d’épargne. La rentabilité n’est pas la première des motivations ; c’est un point évoqué pour distraire l’attention d’un achat souvent jugé déraisonnable, un argument à destination d’un entourage parfois insensible aux charmes de ces vieilles courbes, de ces chromes rutilants ou de ses moteurs conçus pour le plaisir des sens. Mais il est vrai que l’opportunité du placement n’est pas à dédaigner : en seulement douze ans, le prix à la revente des voitures de collection s’est apprécié en moyenne de 400%, bien loin devant les œuvres d’art ou le vin (2). Il est vrai que cela concerne surtout les modèles prestigieux des années 1950-1960, les marques que l’on retrouvait alors sur les circuits : Bugatti, Jaguar, Lotus, Ferrari, Aston Martin… Des marques et des modèles qui font tourner la tête à toutes les époques. Mais qui ne s’est jamais arrêté pour contempler, admiratif et un peu envieux, une Traction Citroën, une Simca Aronde ou une simple Renault, celles de l’époque où elles s’appelaient Frégate, Floride ou Caravelle ?

Aujourd’hui le marché des voitures de collection pèsent 40 milliards d’euros (3), en progression constante depuis des années, même avec la crise. Certes, tout le monde n’a pas les moyens d’investir entre 5 et 15 millions d’euros dans une Ferrari 250 GTO de 1959. Mais nul besoin d’investir des millions pour se faire plaisir et susciter l’admiration. Il s’agit d’une passion accessible à toutes les bourses, et pour les plus bricoleurs – et les plus patients – certaines carrosseries s’échangent pour quelques centaines d’euros. Pour moins de 10 000 euros, ce sont des milliers de modèles qui sont disponibles, de tous les constructeurs, toutes les époques, pour tous les goûts. Avec en prime la satisfaction de conduire un véhicule dont la valeur ne s’effondre pas avec les années. Ceux qui fréquentent les rassemblements de collectionneurs savent bien qu’il s’agit d’une activité très égalitaire, indépendamment des modèles de voitures présentés : ce qui compte, c’est la passion commune - partagée à égalité par tous - pour ces vieilles mécaniques tellement décalées par rapport au parc automobile actuel.

La voiture ancienne, c’est un peu de luxe accessible, un pied de nez au conformisme et à l’uniformité. C’est le refus du diktat des normes, une forme de contestation innocente. « L’ancienne » n’est pas forcément confortable, elle sent parfois l’huile et l’essence, elle consomme plus que de raison, et on ne sait pas toujours si elle tiendra jusqu’au bout d’un long trajet. Mais elle représente justement cette petite prise de risque, ce saut dans l’inconnu, qui nous oblige à conduire attentivement, en l’écoutant à l’affût du moindre raté ou d’un quelconque bruit suspect. La conduite est prenante, exigeante et fatiguante ; elle demande de la concentration, du doigté, de la maitrise, et parfois un vrai talent : pas d’assistance électronique où que ce soit, les sensations de la route sont brutes. Il n’est pas étonnant dès lors de se prendre pour un pilote, même si la plupart du temps, les vitesses atteintes hors circuits ne font guère frémir les radars.

L’achat d’une voiture de collection n’est pas raisonnable, rationnel ou logique, même s’il est rentable. C’est un achat plaisir et passion, renforcé par ce petit orgueil d’être celui qui refuse une certaine conception de notre société uniformisée, aseptisée, sécurisée. C’est un pari de liberté, un peu hors du temps, avec en prime quelque chose dont on a du mal à se passer au fil des kilomètres : le regard des autres conducteurs, les signes de la main, ou simplement l’émerveillement des enfants.

  1. http://www.lefigaro.fr/placement/2013/04/04/05006-20130404ARTFIG00512-les-voitures-de-collection-placement-le-plus-rentable.php
  2. http://www.ft.com/cms/s/2/e9a462f4-6a71-11e2-a7d2-00144feab49a.html#axzz2P7UlHla2
  3. http://www.slate.fr/lien/70137/placement-voitures-collection-mieux-art-bourse