Des pratiques commerciales trompeuses venant de la direction
Depuis le 23 septembre 2024, Sadri Fegaier, PDG de la SFAM, et six de ses sociétés sont jugés pour des pratiques commerciales trompeuses à grande échelle. La procureure Anne Proust décrit un "business model frauduleux" basé sur la tromperie des consommateurs. Les clients, séduits par des assurances multimédias à bas coût, ont rapidement été piégés. Les prélèvements abusifs s’accumulaient, atteignant des milliers d'euros pour certains, tandis que les demandes de résiliation restaient lettre morte. La répression des fraudes, alertée par l'association UFC-Que Choisir, a mené une enquête révélant l'ampleur du système de tromperie. Près de 2 000 clients se sont constitués partie civile, dénonçant une véritable arnaque orchestrée depuis la direction de la SFAM.
La procureure Anne Proust souligne que les pratiques commerciales trompeuses émanaient directement de la direction, et non de simples employés "zélés". Selon elle, Sadri Fegaier avait un double objectif : "garder les clients et ne pas les rembourser". Cette stratégie reposait sur une multiplicité de prélèvements modestes (de 15 à 20 euros par mois) et l’utilisation de filiales inconnues des clients, rendant les remboursements et résiliations quasi impossibles. Les discours oraux, privilégiant le téléphone, et un logiciel conçu pour bloquer les demandes de remboursement, faisaient partie intégrante de ce système. Les consommateurs piégés se retrouvaient comme "dans les sables mouvants", s'enfonçant un peu plus à chaque tentative de réclamation. Pour Anne Proust, Sadri Fegaier aurait pu "stopper la machine" en 2019 après une amende record de 10 millions d’euros, mais a choisi de laisser "la machine s'emballer".
Stopper les dérives de la société de consommation
Face à cette fraude massive, le parquet a requis une peine exemplaire contre Sadri Fegaier : deux ans de prison, dont 18 mois ferme, avec mandat de dépôt immédiat. Une amende maximale de 300 000 euros, la saisie de ses biens immobiliers et une interdiction de gérer une société pendant cinq ans ont également été demandées. Le ministère public réclame en outre des amendes de 50 000 à 1,5 million d'euros contre les six sociétés impliquées, dont SFAM et SFK Group, et leur fermeture. Anne Proust considère que cette affaire, qualifiée de "plus gros dossier" de la DGCCRF à ce jour, est un "puissant révélateur des dérives de la société de consommation". La magistrate évoque également les répercussions sur l’emploi local, avec des centaines de salariés laissés sur le carreau suite à la liquidation d'Indexia, groupe auquel la SFAM appartient.
Lors de la dernière audience, les avocats de Sadri Fegaier ont vigoureusement contesté les accusations portées contre leur client. Ils ont mis en avant les limites de l’enquête de la répression des fraudes, accusant celle-ci de se concentrer uniquement sur le service commercial de la SFAM, tout en omettant le rôle du service qualité. Ils ont également rappelé la présomption d'innocence et critiqué la pression médiatique autour du procès. Selon eux, Sadri Fegaier ne saurait être tenu pour seul responsable des dysfonctionnements d'un groupe où la prise de décision est collégiale. "Il y a une collégialité dans la prise de décision", affirme Me Chirez, l'un des avocats du PDG. Le tribunal rendra son verdict le 17 décembre 2024.